en Norvège, d'Oslo au cap Nord

du 21 juillet au 16 août 2001

2543 km en 16 jours de vélo

(et 5 jours de train et de car entre Oslo et Albertville)

 

Cette page contient un diaporama de 270 photos

et les impressions du voyageur à vélo d'Oslo au Cap Nord

 

D' Oslo au Cap Nord en août 2001


Les chiffres: 2543 kilomètres en 16 jours de vélo soit 159 par jour.
97 kilomètres le premier après-midi et 100 kilomètres la dernière matinée pour aller au cap Nord.
139 pour la plus courte étape d' une journée complète et 219 pour la plus longue.
Des journées, d'un camping à l'autre, comprises entre 9 heures 30 et 13 heures 30 sur la route.

Le soleil à minuit?

En fait le soleil de minuit n' existe que jusqu'à fin juillet tout au nord. Et cela induit une fréquentation touristique sur la route E6 qui suit la côte de la mer de Norvège de Trondheim au Cap Nord. Sachant que le temps est très brumeux au Cap Nord et qu'il faudrait y rester 2 ou 3 semaines pour avoir une chance de voir le soleil à minuit, J'avais donc choisi de monter là-haut juste après, ne serait-ce que pour avoir moins de circulation automobile.
Départ donc le 27 juillet et arrivée un peu avant le 15 août, date à laquelle arrivent les pluies d'automne.
Comme je me couche en camping vers 21h30-22 heures pour me lever vers 7-8 heures, je faisais la grasse matinée tous les jours (9-10 heures de repos au lieu de 7-8 habituellement): avec ces horaires-là je n'ai pas eu l' occasion de voir la nuit, même à l'étape du 9 août qui s'est terminée vers 22 heures 30. Vite dans le fond du sac de couchage alors que le ciel s' assombrissait un peu ...
Premier avantage donc: pas besoin de se bousculer pour ne pas avoir à rouler de nuit.

Et la pluie alors?


Au début, la traversée du sud de la Norvège se fait très loin de la mer. Ce n'est que dans la deuxième semaine que l'on reste à moins de 40 kilomètres de la réserve de pluie.
Il faisait en fait une belle canicule en passant à Hambourg, le 28 juillet et même à l'arrivée à Oslo à 7 heures du matin, il faisait encore une bonne température d' été. Ce n' est qu' au bout d'une semaine que je suis passé à des températures "bretonnes" de printemps (12-15°) et dans la deuxième semaine que j' ai eu des températures "bretonnes" d' hiver (10°).
Même sur les grands plateaux du nord battus par le vent il ne faisait guère plus frais que chez nous certains matins d' automne et surtout il y avait très peu d' écart de température entre le jour et la nuit (quasi-inexistante vers le nord) et d'un jour à l'autre; en conséquence, en roulant régulièrement, les remontées quasi quotidiennes au dessus de 500 mètres d'altitude permettaient de me réchauffer sur des pentes à 8% environ et le maintien d' une allure soutenue le long de la mer ou entre les chaînes de montagnes faisait le reste.
Encore merci au gulf stream qui, venu des Antilles, glisse par dessus les îles britanniques et maintient ce climat très tempéré pour la latitude extrême.
Ce qui n'a pas empêché 2 longues après-midi de pluie, 2 jours de suite à mi-parcours: de midi à 18 heures sous la cape de pluie, c'est vraiment très long mais il fallait bien avancer vers le nord.
Le reste du temps il a fait globalement beau avec quelques passages de pluie légère contrairement à ce qui se passait tout au nord où je suis arrivé à la fin d'une quinzaine de pluies continuelles d' après un alsacien croisé sur la route. J'ai donc eu de la chance.

La Norvège, ça doit être assez plat?

Le ventre de la Norvège est très montagneux et la route E6 (ainsi que la voie ferrée d'ailleurs) s'élève à plus de 1000 mètres vers Hjerkinn. Quant aux routes secondaires que j'ai prises dans cette première partie du voyage elles remontent les rivières en pente douce ou grimpent brusquement à 8% pendant 3 à 8 kilomètres pour monter sur des plateaux magnifiques avec un relief adouci et des lacs et des landes et des forêts.
A partir de Trondheim on longe beaucoup plus la mer et j'ai pu emmener de gros braquets le long des fjords ou derrière la première chaîne de montagne qui me séparait de la mer: merci à l'inertie des sacoches.

Et la bouffe?

Comme la Norvège est un pays très peu peuplé (4,5 millions d' habitants pour 2 fois et demi la surface de la France), il ne fallait pas rater la (ou parfois les 2 ou 3) supérette(s) de la journée.
Les restaurants étant hors de prix j'ai mangé froid presque tout le temps: salades de patate (500 voire 700 grammes) de carotte ou de betterave. N' ayant pas de vinaigre, les Norvégiens utilisent de la crème légèrement surie et c'est délicieux surtout avec les pains très variés de ce pays.
Bien sûr j'ai essayé aussi la charcuterie (andouille et salami) et le poisson au restaurant le dernier soir avant l' arrivée: un beau morceau cuisiné aux oignons mais avec des légumes bouillis à l' eau ce qui fait dire au guide du Routard que les Norvégiens ne savent pas cuisiner. J'ai également réussi à avaler ce que j'avais pris pour de la mozzarella et qui était du poisson "comprimé"; vous lisez correctement les étiquettes en norvégien, vous?

Et pour dormir?

Dés l'arrivée en gare d' Oslo on m' a donné les 2 cartes des campings de Norvège correspondant aux 2 fédérations de campeurs. Les campings sont tous très bien équipés (en lave-linge et plaque chauffante par exemple) et d' une propreté parfaitement scandinave. Ils sont un peu chers (10 Euros en moyenne) et parfois distants les uns des autres d' une quarantaine de kilomètres. D'où certaine étape un peu longue et à arrivée tardive (21 heures 15) pour cause de fermeture du camping visé.
Le camping dit sauvage est tout-à-fait autorisé (sauf au bord même des lacs et des rivières) mais je préfère le confort de la douche chaude et des WC (et puis aussi le plaisir de voir un peu de monde): nobody is perfect.
Dans ces campings il y a surtout des gens qui se regroupent par 4 pour louer une "hytter", baraque de bois équipée de 4 lits pour 45 Euros environ la nuitée. Je n'en ai profité qu' une fois, le soir de cette étape un peu longue, puisque la gérante (la seule que j' ai rencontrée ne sachant pas parler anglais) me proposait une (rare) hytter à 2 places pour 15 Euros seulement: voilà où vous mène la flemme de monter votre tente ...
Les jours où il pleuvait les campings étaient pratiquement vides et le reste du temps on sentait la fin de saison.

La circulation?

Sur la E6 les semi-remorques et les cars vous frôlent car il n'y a que 2 voies relativement étroites mais les chauffeurs sont des champions dans ce pays aux routes taillées dans le rocher (le plus souvent marbré) à grand coups de dynamite, en tunnels ou en corniche ou sinuant le long de la mer. Quant aux touristes autochtones ils ne conduisent manifestement qu'en vacances et sont donc très prudents: les voitures norvégiennes vous doublent sans toucher à votre voie de circulation (les 4 roues de l' autre côté de la ligne pointillée), les allemandes passent à cheval sur cette ligne et vous reconnaissez facilement le (2 ou 3 au maximum puisque la vie est très chère ici) Français de la journée à ce qu'il partage avec vous la voie de droite (pourquoi donc modifier sa trajectoire pour un vélo, je vous le demande?).
Sur les routes secondaires gare à l' infarctus: avant qu'il passe quelqu'un vous avez tout le temps de mourir en paix.
Aux abords des grandes villes les pistes cyclables vous accueillent et sont clairement repérées.
Les tunnels sont, au moins au sud, interdits aux vélos et les itinéraires de substitution parfaitement signalés par les panneaux des voies cyclables: par exemple 27 kilomètres de quasi solitude avec des pentes à 10% pour contourner un cap un lac et un glacier et surtout éviter un tunnel de 4 kilomètres au nord de Fauske mais aussi une belle route locale en corniche au bord de mer et en descente au lieu d' un tunnel bien éclairé mais sans intérêt autre que le gain de temps.
Et puis enfin, pour aller du continent sur l'île de 20 kilomètres de long où se trouve le cap Nord, il faut traverser un bras de mer de 5 kilomètres. D' où, depuis 2 ans, un tunnel de 6,870 kilomètres qui évite de prendre le ferry d' Hönningsvaag: j' ai un peu hésité, à l' entrée, quand j'ai compris, à l'indication des 212 mètres sous la mer, que j'allais battre mon record d'altitude (négative) mais je me suis finalement engagé dans les 2 kilomètres à 10%, certes relativement éclairés mais plongeant dans les entrailles de la terre. Pour traverser et remonter l'équivalent à l'autre bout, il m' a fallu près d' une demi-heure mais je n' ai été doublé que par 2 voitures; c'est le plus impressionnant d' entendre résonner le bruit d' un moteur qui est encore loin mais qu'on "entend" déjà sur son porte-bagage.

Le Cap Nord!

Sur cette île qui n'est plus protégée des vents d' ouest et qui est un plateau à 300 mètres au dessus de la mer, il faut redescendre 2 fois pour desservir les 2 villages côtiers et remonter dans le vent. On roule appuyé sur le vent avec une bonne inclinaison et quand une voiture vous croise, elle coupe le vent et vous manquez de peu, à chaque fois de toucher sa carrosserie: heureusement, une seconde plus tard, le vent vous redresse en vitesse!
Comme prévu, au cap lui-même (un parking à 20 Euros par passager motorisé 500 mètres avant la dernière falaise et un édifice librairie-papeterie-cartes postales) le brouillard ne permettait la vue que sur les 10 premiers des 300 mètres tombant dans la mer. Et en plus il gelait: j'ai croisé 2 cyclos polonais en jeans qui n'en menaient pas large malgré leur sourire.

Les autres cyclos:

Des Allemands et des Hollandais, seuls ou par deux, des Suisses aussi mais pas de Norvégiens.
Et 2 Alsaciens dont l'un qui redescendait de 15 jours de pluie dans le nord m' a assuré qu'il me serait impossible d' arriver au but à la fin de la deuxième semaine, à cause des tunnels, de la pluie et des côtes qui n'en finissaient pas: ferait mieux de venir s'entraîner sur Grenoble, celui-là!
Et 2 Françaises superbement équipées de beaux VTT qui ont repris le car de l'après-midi au cap avec moi pour rejoindre leur avion à Hönningsvaag.

Et le retour?

Ne voulant pas m'imposer la date de retour j'avais abandonné le choix de l' avion. J'avais donc un billet Interrail à 2 fois 3 zones (Suisse, Allemagne, Danemark et Norvège, Suède, Finlande) qui me permettait de voyager pendant 30 jours dans tous ces pays pour 370 Euros (restait à payer les couchettes, les réservations et les suppléments trains rapides).
Je suis donc parti un vendredi à 17 heures 30 pour arriver à Oslo le dimanche matin à 7 heures.
Quant au retour: 1 heure de car du cap à Hönningsvaag, puis 4 heures jusqu' à Alta où, à 20 heures, il n' y avait rien avant 10 heures 30, le lendemain. Par chance, je suis tombé au camping sur un chauffeur de car annécien en panne depuis 5 jours et qui repartait vers le sud à 4 heures du matin.
En 9 heures j'étais à Narvik d' où partent les trains vers la Suède. 24 heures pour traverser la Suède et autant pour traverser l'Allemagne, la Suisse et les Alpes du Nord soit, au total 77 heures, 3 cars et 8 trains pour rentrer. Bonjour les paysages!
Le transport du vélo s' est fait dans une housse, garde-boue, porte-bagage et pédalier démontés, guidon tourné; quand on a l' habitude, on remonte le tout en une heure à l'arrivée. Mais il faut se renseigner car certains trains allemands "de luxe" n'autorisent pas ce genre de bagage encombrant.

Et les Scandinaves?

Ils sont très discrets et ne vous remarquent pas mais, à la moindre demande, ils s'emparent du problème à résoudre: que ce soit pour trouver une place pour mes bagages (chargé comme j'étais, je suis arrivé bon dernier dans la cour de la gare de Malmoë) dans le car dont les soutes étaient pleines ou pour m' aider à réparer 2 rayons cassés à Narvik pendant les congés du vélociste local, les autochtones se sont chargés eux-mêmes de résoudre mes problèmes avec une certaine jubilation.
Le plus spectaculaire, ce sont ces vélos (sans antivol évidemment) qui restent jour et nuit contre les murs des maisons au bord de la route, protégés par une haie de 30 bons centimètres de haut et 10 mètres de pelouse seulement.
Quant aux parkings à vélos à Copenhague et à Stockholm il faut compter par centaines les occupants et par dizaines dans les plus petites villes au nord de la Suède.
Mon voyage tendant plus au raid qu'au tourisme proprement dit, je n'ai pas approfondi les relations malgré qu'ils parlaient (presque) tous un bien meilleur anglais que le mien.

Et pour quels souvenirs?

Pour les raconter, rien ne vaut des photos, bien sûr ...
Mais j'ai visité, à Oslo, avant de partir, le Norsfolkmuseum avec ses maisons (et une église) de bois, ses guides en costumes provinciaux et son gazon sur les toits, puis le VikingskipHuset avec ses 3 bateaux vikings ayant servi de tombeaux et récupérés dans la vase. Ensuite j'ai pinaillé pour sortir de cette ville étendue sur des kilomètres.
Et puis j'ai traversé ce pays dans toute sa longueur et ce fût un régal, sans cesse au bord de l'eau (rivière, lac ou fjord), presque toujours dans la forêt et, vers la fin dans ces landes à herbe rase où les rennes nomadisent en compagnie de leur maîtres "samés" (qui ne veulent pas qu'on les appellent lapons).
J'ai visité 3 églises "en bois debout" parmi les 27 du XIIème siècle qui ont échappées à l'incendie (sur 700 au départ) et j'avais choisi ma route pour les voir.
J'ai croisé un vieux couple tout fier de me montrer, à côté de la gravure du renne d'il y a 5000 ans à Bolarein, la découverte du mois précédent: une gravure représentant un skieur préhistorique.
J'ai visité un musée privé de l'habitat traditionnel après 3 kilomètres de chemin de terre et une traversée de ferme.
J'ai vu les monuments aux morts des combats de juin 40 quand les Norvègiens, alliés aux Français, ont essayé (en vain, pour cause de défaite en France) d'empêcher l'Allemagne nazie de s'emparer du fer suédois.
J'ai vu beaucoup de stèles dédiées aux prisonniers de guerre russes et yougoslaves morts en construisant la route du Nord.
J'ai longé le Lyngen fjord pendant presque une journée, me régalant de la vue des "Alpes" de Lyngen, sur l' autre rive, avec ses glaciers descendant presque à la mer.
J'ai franchi le Cercle Polaire Arctique le 6 août, vers la mi-parcours et c'est un beau col à 700 mètres d'altitude, tout en longueur avec d' énormes nuages tourmentés plein le ciel.
Je me suis émerveillé de beaucoup de choses très ordinaires comme un centimètre de confiture de framboise sur 2 centimètres de pain au petit-déjeuner, dégusté assis sur un rocher au bord du lac, et je me rappelle bien d'avoir surtout été heureux pendant cette grande promenade.